mercredi 29 décembre 2010

No et Moi, Delphine de Vigan

Moi je voyais l'heure qui tournait et No qui ne se réveillait pas alors qu'elle avait son rendez-vous avec l'assistante sociale. Je voyais le moment où mon père allait lever les yeux vers la pendule, où il se dirait voilà, c'est bien la preuve que ça ne va plus, que ça dérape, qu'on ne peut plus compter sur elle. Je me suis levée,j'ai dit je vais la réveiller, c'est elle qui me l'a demandé. (...)
Vers midi je l'ai retrouvée dans sa chambre, j'ai essayé de lui parler, mais elle ne semblait pas m'entendre,j'aurais voulu la secouer de toutes mes forces, au lieu de ça je suis restée en face d'elle, sans rien dire, son regard était vide.

mercredi 22 décembre 2010

Anna Gavalda, Ensemble c'est tout

Camille regardait Franck en souriant.
Garde-le ton petit sourire de merde, j'en veux pas. C'est tout ce que tu sais donner, toi... Des petits sourires pour embrouiller le gens... Garde-le va, garde-le. Tu finiras toute seule dans ton donjon avec tes crayons de couleur et ce sera bien fait pour ta gueule. Moi je sens que je fatigue, là... Le ver de terre amoureux d'un étoile, ça va un moment...
Franck regardait Camille en serrant les dents.
Que t'es mignon, toi, quand t'es en colère... Que tu es beau quand tu perds les pédales... Pourquoi je n'arrive pas à me laisser aller avec toi ? Pourquoi je te fais souffrir ? Pourquoi je porte un corset sous ma cuirasse et deux cartouchières en bandoulière ? Pourquoi je bloque sur des détails débiles ? Prends un ouvre-boîte merde ! Regarde dans ta mallette, je suis sûre que tu as ce qu'il faut pour me laisser respirer.

jeudi 16 décembre 2010

Les Coloriés, Alexandre Jardin

Mais ma déséducation ne progressa vraiment que parce que j'appris à jouailler avec les mots dans les colonnes de notre gazette. La plume à la main, je me désâgeais pour plaire à Dafna, patamodelais avec rage mon nouveau tempérament, me récréativais d'imaginaire, me vacançais en loirant sans vergogne. Après avoir savouré un Baiser de Maman au Miel, je me doigtsuçais en rêvant de marmailler Dafna qui, j'en étais certain, serait bientôt ronde de moi! Elle me monopolisait infiniment, vous l'avez saisi. Point n'est besoin d'empanacher mon style pour claironner que je n'avais de cesse de l'embuscader de baisers, de la provocater à des jeux divers, de l'esbroufer de câlins. Ce festoiement verbal faisait de nos parleries quotidiennes un ravissement. En retouchant mes vieux mots de Culotté, en culbutant nos substantifs (pour les pervertir en verbes) et notre conjugaison (pour la dérider), j'établissais avec mes nouveaux compatriotes cette connivence qui rend la dérision plus efficace, la joie de sabirer plus complète.
En un mot, je me coloriais